PSY : Le TDI ou l’histoire de Billy Milligan.

« Il est pas tout seul dans sa tête »

Expression argotique servant à souligner la folie et l’instabilité d’un individu.
Et bien sachez qu’en ce qui concerne notre homme, c’est au sens littéral que cette phrase prend tout son sens… Billy Milligan est le cas reconnu le plus célèbre de TDI (Trouble dissociatif de l’identité) aussi appelé TPM (trouble de la personnalité multiple).

Billy Milligan. Ce nom refait surface en 2016, à la sortie du film SPLIT de Night. M. Shyamalan, librement inspiré de son histoire.

Billy Milligan

Tu te doutes bien que si je te raconte cette histoire, c’est qu’elle est bien plus complexe que le tableau dressé dans ce film dont je me garderais de faire une critique ici, même si je tiens quand même à souligner la performance délicieuse de James Mc Avoy (un bonbon pour mes yeux lassés d’un an de co-vide).

DU MEDICO-LEGAL AU « LEGO » MEDICAL

26 octobre 1977, 21 heures :
Une escouade de police tambourine chez Billy Milligan et procède à son arrestation au motif de viol et séquestration sur trois jeunes femmes.
Lors de la perquisition, on retrouvera les effets personnels des victimes à la cave, et bien d’autres preuves irréfutables…Billy déclare ne se souvenir de rien et coopère avec les forces de l’ordre qui trouvent que décidément, le profil ne colle pas.
Les enquêteurs pensent, à juste titre, (ils ne se doutent juste pas jusqu’à quel point) que ce garçon a décidément un pet au casque. Il est donc incarcéré dans l’attente de son procès.

C’est ici que commence son histoire.
Criant sa détresse depuis sa cellule, il tente plusieurs fois de mettre fin à ses jours, obligeant l’institution carcérale à agir, le procès n’ayant encore eu lieu. Il est donc soumis à une première évaluation psychiatrique par le docteur Driscoll.
Son diagnostic est aussi simple qu’erroné : schizophrénie.
Le traitement n’eût logiquement aucun effet et Billy enchaîna les tentatives de suicide aussi vite que Marc Lévy pond des bouquins.
Arrive alors Dorothée Turner {insérer ici musique épique de votre choix}.
Une jeune psychologue, qui, armée d’une solide analyse clinique et d’entretiens rigoureux, va découvrir l’impensable : Le corps de Billy abrite pas moins de 23 personnalités différentes (contre 2 ou 3 habituellement dans ce type de trouble). Un record pour cette pathologie très controversée !
Je vous jure, moi qui suis de la partie, c’est IN-CROY-ABLE.
Des hommes, des femmes et des enfants aux caractéristiques morales et intellectuelles très différentes se disputent le projecteur de la conscience de Billy.
L’une de ses personnalités, Arthur, parle et écrit dans un arabe académique. Ragen lui, maîtrise le serbo-croate.
Evidemment, Billy n’a jamais étudié ces langues et au vu de son parcours scolaire très court et chaotique, il paraît évident qu’il n’a pu le faire en autodidacte. Bien.

Maintenant que nous savons que dans sa tête c’est le bordel, rentrons un peu plus dedans.

UN CODE, UNE ETHIQUE, ET UNE COHESION

Les « colocataires » de Billy seront constamment au nombre de 23. Certaines personnalités apparaissant et disparaissant au fil du temps.
Billy, Ragen, Arthur, Shawn, Kristin, David, Samuel, April, Mark, Steve, Lee…bon… on pourrait faire tout le calendrier… Si Billy n’est pas souvent aux commandes, c’est que ses penchants suicidaires en font un danger potentiel pour les autres, son corps étant l’habitat de 23 personnes.

Les personnalités sont ainsi classées en 2 catégories :

  • Les « 10 » : 10 « personnes » seulement sont autorisées à s’exprimer à travers le corps de Billy. Leurs personnalités étant reconnues comme « safe ». Elles sont chapeautées par Arthur, un anglais de 45 ans.

C’est lui qui fédérera les personnalités, persuadées jusqu’alors chacune, d’être seules à partager le corps de Billy.

  • Les « Indésirables » : Au nombre de 13, elles n’ont pas le droit d’interférer.

Pourquoi ?

  1. Ces entités ne font aucun cas des conséquences de leurs actes et mettent donc l’intégralité des structures en danger. Philipp adore déclencher des bagarres dans les bars, Kevin braque des drugstores et Lee insulte les autorités dès qu’il peut. Ils consomment également du cannabis, ce qui fragilise l’ensemble des constructions psychiques.
  2. Il s’agit parfois de personnalités considérées comme sociétalement inacceptables à l’époque. Adalena est une jeune lesbienne de 19 ans, Ragen un immigré qui maîtrise mal l’anglais…

Un code est alors édicté au sein des « 10 » pour permettre la survie de tous.

Les règles sont :

  • protéger Billy,
  • protéger les « enfants » comme Kristin (3 ans et demi),
  • empêcher l’arrivée des indésirables et tourner son esprit vers les arts qui semblent canaliser le tout.

Simple non ? Ne réponds pas, c’est une blague. Mais je t’aime quand même.

UNE DECISION HISTORIQUE QUI VA TOUT CHANGER

Attendez ! Je peux rendre cette histoire encore plus « folle » ! Si, si, je vous jure !
Et oui, car je suis le Gérard Majax du pitch !
Les Etats-Unis, et je ne vous apprends rien, sont très frileux en matière d’acquittement…surtout pour des causes d’aliénations mentales qui peuvent toujours être « simulées ».

(NDLR : c’est loin d’être facile de petit filouter un expert psychiatre auprès des tribunaux, mais bon l’argument de la simulation reste fréquemment avancé…)

Et pourtant ! En Mars 1977, Billy Milligan est acquitté. C’est la première décision d’acquittement pour aliénation mentale dans le cas d’un trouble de la personnalité multiple.
Grace à cette courageuse décision (parce que oui, faut avoir des balloches de la taille de l’Australie pour rendre ce genre de verdict en tant que juge aux States), Billy intègre un programme thérapeutique au Harding Hospital de Worthington où…après de longues années, il va developper une 24eme personnalité.
C’est vrai. Quand on aime…on ne compte pas… Appelée « Le Maître », elle sera une des clés de sa « guérison ». Capable de distribuer le temps de parole aux différentes entités, elle ramène une cohésion dans l’esprit morcelé de Billy et fusionne ainsi toutes les personnalités.
Cela ne durera malheureusement qu’un temps.
En effet, la pression médiatique et judiciaire, vecteurs de grand stress, entachera cette stabilisation.
Le livre « Les mille et une vies de Billy Milligan », témoigne des longues entrevues accordées par Billy à son auteur Daniel Kayes, et aussi de la relation de confiance qui s’est instaurée avec chaque personnalité.
Des années auront été nécessaires, des heures d’enregistrements, des tonnes de patience, mais Billy passera ainsi à la postérité, devenant ainsi un cas d’école.
Billy Milligan sortira de l’institution psychiatrique en 1988 avec l’accord d’une commission médicale le jugeant « apte à réintégrer la société ».
Il vivra reclus jusqu’à sa mort en 2014 à l’âge de 59 ans.

LE TDI ? VERITE OU SUPERCHERIE ?

Alors je vais commencer par faire une mise au point sur le dédoublement de la personnalité et corriger cette idée reçue, véhiculée par les médias et la pop-culture.

LA SCHIZOPHRENIE N’EST PAS UN DEDOUBLEMENT DE LA PERSONNALITE !!!

Putain je vous jure, ça fait du bien !

Je vous ferais un petit pitch de vulgarisation sur la schizophrénie si cela vous intéresse. (pour ça partagez ou contactez moi qui (et combien) que vous soyez !)
Le TDI serait, dans la théorie, une tentative de la psyché de survivre à un évènement traumatique majeur, arrivé durant l’enfance. Billy d’ailleurs, de ce côté là, c’est un carton plein !
Tumeur grave à l’âge d’un mois qui manque de l’emporter, suicide de son père, mais surtout abus sexuels réguliers de son beau-père, qui, un jour, lui fera creuser un trou tout une après-midi pour « l’enterrer vivant ». Tâche qu’il remettra verbalement au lendemain à la nuit tombée et à toutes celles qui viendront.
Qu’est ce qu’on s’éclate chez les Milligan !
Pas étonnant que Billy commence à developper des troubles mentaux qui seront systématiquement catégorisés comme « névrose hystérique ». Peste ou choléra ?
Le cerveau de Billy a choisi ! Scinder sa psychée, pour en préserver l’intégrité…
Ce n’est pas à moi que cela arrive, c’est à l’AUTRE.
Bien entendu et je vous le rappelle, la psychiatrie est une science médicale mais aussi une terre d’hypothèses avec des écoles de pensées, des thérapies et des théories très différentes (Freusdisme, Lacanisme, Jungisme…) et des rivalités plus ou moins marquées…
Personne n’a jamais ouvert un cerveau et dit bonjour à l’inconscient…ce qui serait en soi…inconscient. Il n’existe à l’heure actuelle aucune « vérité universelle » concernant le TDI, ses mécanismes et ses causes. Il constitue donc une des parties les plus controversées du DSM-V . DSM-V ? Kézako ?
Il s’agit du « Manuel diagnostique et statistique » international, mis à jour régulièrement. C’est un peu le « Code de la Route » des psychiatres mais pour des véhicules qui ont perdu des roues…
Beaucoup de psychiatres ont réfuté l’existence du TDI dans sa forme « dédoublement de la personnalité » pour les catégoriser au final, dans l’hystérie.

Le véritable question étant : SIMULATION OU REALITE ? La vraie réponse étant : ON SAIT PAS.
Il existe néanmoins des preuves, que certains cas (notamment celui de Billy) n’ont pu être feints.
Le second conflit des collèges de psychiatres concerne la prévalence du TDI. En effet, une recrudescence spectaculaire de cas a fait son apparition dans les années 1980 et principalement aux Etats-Unis, ce trouble étant extrêmement rare en Europe.

Aujourd’hui en France, très peu de psychiatres adhèrent à la théorie du TDI, et bien peu y ont été réellement confrontés… Les Etats-Unis ont l’air plus touchés qu’aucun autre pays.
Pourquoi ?
Les hypothèses ont fusé :

  • dissociation due à un mode de vie fragmentée,
  • pays morcelé avec des règles dissociées,
  • effet de suggestion par le nombre,
  • tendance à vouloir diagnostiquer du spectaculaire,

Au final, peu de réponses ont été apportées, et des patients continuent de souffrir.
Dans le monde de la psychiatrie, les égos des médecins servent à se positionner, mais aussi, il ne faut pas se le cacher, à publier, écrire, être cité en référence…
Mais voilà, souvent dans ces combats de coqs, c’est le patient qui trinque (mais sans modération).
Enfin, voilà, vous en savez un peu plus sur ce jeune homme qu’on peut qualifier d’extra-ordinaire, fêlé certes, mais qui repousse à lui seul, tout ce que nous savions ou pensions savoir sur le psychisme.


Comme je sais que vous êtes des petits goulus de savoir, Mama Pitch a condensé pour vous quelques liens utiles, pour en savoir plus sur notre héros de la semaine.
Le sujet étant délicat, j’ai sélectionné des liens que je pense pertinents, en faveur ou non de la théorie du trouble de la personnalité multiple.
Mon but, n’étant pas de vous convertir, mais de vous aider à vous instruire !
C’est offert, ça me fait plaisir !

Jasmine B (verbicruciste à Perpignan)

LIENS :

Lecture :

Audio :

Vidéo :

2 commentaires Ajouter un commentaire

  1. Cha dit :

    Sympa ton article
    J’en sais desormais plus sur le TDI et je vais ainsi pouvoir briller dans mes soirees mondaines 😉.
    T’inquiète, je ne manquerai pas de citer pitchbull 😘.
    C’est addictif ton truc.
    Au fait, j’ai vachement aimé la proie des âmes de Matt Ruff sur ce sujet si tu as une petite envie de lecture.
    Bisouuuus
    Cha

    J’aime

    1. Jasmine.B dit :

      Merci pour tout ces gentils retours ! Mon coeur se remplit de caramel au beurre salé 🙂
      Je suis ravie de te compter parmi nos abonnés et n’hésites pas à le faire savoir 😉
      Merci pour le conseil de lecture, je l’ajoute à ma liste 🙂
      Bonne journée

      J’aime

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